**Une légère odeur flottait dans l’air. Une odeur lourde et nauséabonde. La première idée qui traversa l’esprit du jeune brunet était l’oubli d’un changement de sac poubelle, mais c’était beaucoup plus que cela. En réalité, une personne avait été tué dans la pièce d’à coté, mais cette information n’était pas dévoilé au jeune homme. Il s’agissait d’un meurtre lié aux gangs de rues, mais évidemment, la police ne débarquerait pas en ces lieux avant un bon bout de temps. L’âme du défunt drogué errait sans doute dans le Skyline désormais, ce qui était plutôt mieux. C’est en serrant les dents que Jay continua son chemin dans le bloc appartement où il avait passé une partie de sa jeunesse. Il s’agissait d’un quartier mal famé, bien sur, lorsqu’on voyait précisément le genre de parent qu’il avait eu, on pouvait comprendre. Ce n’était pas pour rien qu’il avait fugué de chez lui à l’âge de 12 ans et qu’il n’était jamais revenu. Le brunet avait arpenté les rues longtemps sans avoir de domicile fixe, dès qu’il avait réussis à se faire un nom en tant que Dealer de drogue, il avait réussis à se trouver un taudis pas trop mal. Aujourd’hui, sa vie était toute autre. Il vivait dans les règles. Il avait un appartement, payait avant la fin des mois et possédait même son propre bar. L’homme se sentait beaucoup mieux qu’autrefois, mais cette nuit-là, Wellington fit un rêve plutôt percutant. Il s’était imaginé revoir ses parents. Il ne savait pas si c’était son anniversaire qui avait fait surgit ce genre de pensée, mais ça l’avait tenu durant toute la journée. Après y avoir songé, il se dit qu’il pourrait bien aller faire un tour là, où ses parents avaient vécus autrefois en sa compagnie. Il n’avait aucune idée d’où ils étaient désormais, ni même si ils étaient justement en vie, mais il n’irait pas plus loin dans ses recherches. C’est donc avec déception qu’il quitta le domicile où il avait vécu durant son enfance. Wellington marcha un bout jusqu’à ce qu’il tomba sur une petite maison au bout d’une rue. Il s’agissait d’un quartier beaucoup plus respecté que celle où il avait vécu dans son jeune temps. L’homme se mit à siffler toute en s’allumant une cigarette, c’est là qu’il constata qu’un homme observait quelqu’un par la fenêtre d’une propriété. Encore un voyeur pensa l’homme, mais en se rapprochant de lui, il ressentit que ce n’était guère un vivant, mais bel et bien un mort. Wellington poussa un grand rire et s’avança tranquillement vers l’homme qui semblait l’avoir repéré par son rire prononcé.**

Hey mec, tu regardes quoi par là ? Une vieille mégère qui prend sa douche ?

**Dit l’homme en s’approcha de la fenêtre où il remarqua une jeune femme à l’intérieur. Il arqua un sourcil et pointa avec l’index l’intérieur de la propriété.**

C’est ta femme ou un truc du genre j’espère, parce que sinon, c’est pas mal pervers comme situation Cowboy !

**Jayden ne put s’empêcher de regarder à nouveau à l’intérieur avec le sourire au lèvre. Il prit ensuite une bouffée de sa cigarette et la relâcha dans le ciel.**

Un autre jour commençait, une nouvelle torture pour Axel. Justement, c’était l’heure où le beau brun décidait de sortir de son sommeil. Cette journée serait comme toutes les autres, il le savait. Et il ne dérogea pas à son petit rituel pour démarrer la journée. Il se leva, alla dans la cuisine se servir un café qu’il but devant la télé. Pff à quoi cela sert d’être mort si on passe toujours autant de temps à glander devant la télé ! pensa-t-il en avalant une gorgée de son café. Il y resta une bonne dizaine de minutes avant d’aller reposer sa tasse dans la cuisine pour ensuite filer dans la douche. Une fois cela fait, il ne manquait plus qu’à s’habiller. Et comme toujours, pas de grandes extravagances, un jeans et un t-shirt feront l’affaire. Il était maintenant prêt. Mais prêt à quoi ? A redescendre sur terre. Axel ne pouvait pas concevoir de passer une journée sans y retourner. C’était n’était pas vraiment une nostalgie de la condition mortelle, mais un réel manque pour une personne : sa femme. Déjà qu’elle n’allait pas très bien avant sa mort, là, il la voyait sombrer un peu plus chaque jour. Il espérait au fond de lui qu’elle ressente sa présence, bien qu’elle semblait complètement indifférente à sa présence, il aimait s’en persuader car ainsi il se sentait moins inutile, il avait le sentiment d’être là pour elle. Il traversait donc le fameux tunnel chaque matin, avant qu’elle ne parte au travail, et parfois même le soir. Il la regardait s’endormir, impuissant devant ses larmes et ses cris qu’il ne pouvait calmer. Au fond, c’était une douleur atroce de l’observer faire sa vie sans lui, mais il ne pouvait pas faire autrement.
Il arriva donc devant sa maison, ou du moins celle dans laquelle il avait vécu les plus belles années de sa vie. C’était une charmante maison qui inspirait repos et sérénité. Il s’approcha du portail pour voir à travers la fenêtre de la cuisine. Elle était là, belle comme un ange, à boire son café tout en lisant le journal. Vivant, il aurait été en face d’elle, et il l’écouterait commenter chaque actualité, parfois avec ses mots à elles qui étaient moins didactiques. Mais maintenant, elle restait silencieuse, presque sans vie. Il aurait donné n’importe quoi pour entrer, et lui dire qu’il était là, qu’elle ne devait pas être si triste, il aurait tout donné pour être encore en vie…

Mais alors qu’il était perdu dans ses pensées, une voix s’adressa à lui pour le sortir de ses rêves. Il tourna la tête pour voir un homme s’approcher. « Hey mec, tu regardes quoi par-là ? Une vieille mégère qui prend sa douche ? ». Axel sentit les nerfs montés, pour qui il se prenait lui ? Bon sang, même mort il ne pouvait donc pas être un peu tranquille ! « C’est ta femme ou un truc du genre j’espère, parce que sinon, c’est pas mal pervers comme situation Cowboy ! ». Il le regarda de haut en bas avec un air qui ne trahissait pas sa colère. Déjà qu’il n’aimait pas beaucoup qu’on le dérange, mais alors là c’était pas du tout le moment propice.
« Occupe-toi de tes affaires mec, vas vagabonder ailleurs ! » lui répondit Axel froidement pour toute réponse. Il s’avança alors pour se poser devant l’autre fenêtre de la cuisine. Il se retourna pour constater qu’il était toujours là. Il poussa un long soupire. « Le monde est pas assez grand, nan faut que tu viennes m’emmerder ? Vas te trouver un autre mort à espionner et fous moi la paix. ».
Cela avait le mérité d’être clair. Personne dans le monde des morts n’étaient au courant de l’existence de sa femme, et encore moins qu’Axel venait lui rendre visite, et qui plus est tous les jours. Là, il se sentait violer dans son intimité. Et il n’aimait pas du tout ça !

**Depuis qu’il était gamin, Jayden n’avait jamais résister à l’envie d’aller énerver les gens autour de lui. Soit avec de petites phrases énervantes ou bien par sa présence non désirée. Wellington n’était pas fanatique des ragots, mais il aimait bien se mêler de ce qui ne le regardait pas. Le brunet avait cette manie depuis toujours et ce n’était pas demain la veille qu’il pourrait l’arrêter. C’était sans même avoir réfléchis une seconde qu’il s’était avancé près du jeune inconnu pour lui balancer des propos moqueurs qui ne semblaient pas faire fondre de rire l’homme en question. Jayden perçut même une dose de dégout dans sa façon de répondre, ce qui le repoussa aussitôt. Wellington recula d’un pas, conservant tout de même un bref sourire sur ses lèvres. Il ne savait pas ce que l’homme allait ajouter, mais il n’avait pas envie de partir. Après tout, il était mort et lorsqu’il venait chez les vivants, c’était bel et bien pour errer, ce qu’il était amplement en train de faire. Cet homme avait du culot de lui demander de partir et de lui répondre avec autant de méprit. De toute manière, ce n’était pas le genre de chose qui faisait peur au brunet. Il leva les sourcils en se mordillant la lèvre du bas, amusé plus qu’autre chose par la situation.**

Non, mais on se calme Johnny ! Je voulais pas te faire monter les nerfs à bloc ! Je suis là pour sympathiser, Peace mon gars ! Tu es vraiment trop tendu ! Je connais une bonne massothérapeute ! Elle a peut-être un duvet trop prononcé, mais je te le dis, ces doigts, c’est des bâtons magiques !

**En même temps qu’il concluait sa phrase, le barman leva les bras pour faire bouger ses doigts tels des serpents dans un pot. Le brunet poussa un grand rire et tapota l’épaule de l’homme devant lui. Bien que cela l’aille fait rigoler un peu, cela ne semblait pas être le cas de son interlocuteur qui semblait dur comme fer vouloir qu’il dégage le plus rapidement possible. Wellington avait toute la vie devant lui, il n’allait pas se faire marcher sur les pieds et s’empresser de partir. Il aimait bien le comportement de l’homme malgré tout. Il allait continuer la conversation un peu, peut-être allait-il se calmer un peu.**

On est plus ami maintenant ? Je trouve que tu y vas un peu fort mon cher ! À ce que je sache, tu es autant mort que moi, alors j’ai le droit de regarder ta minette si ça m’enchante ! Mais avant que tu montes sur tes grands chevaux, ne t’imagine rien. Je suis en couple et heureux de l’être, pas besoin de ta barbie pour me donner le sourire ! Je te la laisse !

**Jayden conservait son sourire amusé sur ses lèvres. Il jeta un autre coup d’oeil à la jeune femme et dit.**

Elle n’a pas l’air dans son assiette ta miss ! Elle devait drôlement t’aimer pour être dans cet état ! Mais, si tu viens encore l’admirer par la fenêtre, c’est que tu dois pas être mort depuis bien bien longtemps ?

**Questionna l’homme en arquant le sourcil droit. Il retira ensuite sa casquette pour se gratter le fond de la tête et il l’a replaça immédiatement après, en attendant une réponse.**

Bon et bien visiblement, l’autre mort ne semblait pas décidé à partir comme il lui avait gentiment fait comprendre, bon d’accord, pas si gentiment que ça. Mais c’est vrai quoi, l’avantage de revenir ici c’était que personne ne pouvait le voir. Ici il était tranquille, sauf aujourd’hui où un autre mort avait décidé de venir se mêler de ses affaires. Quel était la probabilité qu’ils se croisent d’ailleurs ! Ce n’était pas vraiment son jour de chance. Il allait devoir faire avec pourtant. Et malgré ses remarques qui auraient pu être prises comme vexantes, il ne bougea pas d’un cil et continua sur de plus bel. Bon sang mais qu’est ce qu’il faut que je fasse pour avoir la paix ! Se demanda-t-il. Et si, comme il lui avait fait remarqué, il ne voulait pas le mettre en colère, c'était pourtant ce qu'il venait de faire. En soi, il n'y avait rien de bien méchant là-dedans. Après tout, il faisait comme Axel, il tuait ses heures de libre, il errait comme la plupart des morts. Le problème c'est qu'il errait au même endroit que lui, et plus que ça trop prés de sa femme ! Le dur et froid Axel était soudain pris de cours. Lui qui montrait une nonchalance que personne ne pouvait lui envier, cette fois-ci, on pouvait le voir comme un homme avec ses faiblesses, et pas la moindre, celle de ne pas arriver à faire le deuil de sa propre mort. Il ne pouvait pas renoncer à sa vie humaine, c'était un fait.
Pire que de le déranger dans ce moment si particulier, voilà maintenant qu'il essayait de plaisanter en lui parlant d'une masseuse dont il avait visiblement testé les talents. Axel en avait vraiment rien à faire, et si il était dans un tel état d'énervement, c'était bien de sa faute à lui. Contrairement à lui, en tout cas la situation avait l'air de beaucoup faire rire son compagnon indésiré. Il eut envie de s'énerver encore plus, mais à quoi cela servirait ?

« Merci du conseil mais je me porte très bien » lui répondit-il comme toute réponse et sur le même ton agacé. Il n'avait pas du tout envie de se faire masser ni par cette fameuse massothérapie, ni par quiconque d'autre. Tout ce qu'il demandait c'était d'être seul, ce n'était pourtant pas bien compliqué. Et comme il ne tarda pas à lui dire, il ne partirait pas. Axel ne savait pas ce qu'il le retenait de ne pas se retourner pour lui mettre son poing à la figure, surtout lorsqu'il parlait comme ça de sa femme. Surement le peu de restant du contrôle de soi qu'il avait appris à avoir lorsqu'il était dans la police de son vivant. Aujourd'hui, même mort, il exerçait le même métier. Mais plus du tout avec la même patience et zen attitude. Maintenant, il allait droit au but et ne laissait plus du tout de place pour le doute, même si cette technique finirait par se retourner contre lui. Il suivait son instinct, mais il savait un jour ou l'autre qu'il ferait les mauvais choix. Peu lui importait, il n'avait plus rien à perdre à présent. Perdre la vie et laisser sa douce seule sur terre était la pire chose qui avait pu lui arriver. Tout ce qui pouvait se passer maintenant ne serait jamais pire.

Il ne répondit cependant rien. Il essaya tant bien que mal de se montrer indifférent à toute provocation de sa part. Mais son expression le trahissait. Il sentait son sang ne faire qu'un tour. Surtout que l'homme venait maintenant de comprendre toute la tragédie de cette histoire : leur dépérissement mutuel. Cette fois ci, il se retourna brusquement vers son interlocuteur, bien déterminé à lui faire vraiment comprendre qu'il était de trop. « Put... » mais il s'interrompit immédiatement en entendant du mouvement dans la cuisine. Daisy venait de se lever et se dirigea vers le salon voisin. Là, sans attendre, Axel se déplaça pour aller maintenant à la fenêtre du salon. Ce qu'il vit alors lui fendit le cœur. Sa femme était debout devant le buffet et serrait contre sa poitrine une photo encadré de leur mariage. « Tu me manques tellement mon amour... » Prononça-t-elle alors qu'une larme perla au coin de ses yeux. Elle fendit finalement en sanglot, se laissant tomber à genou. Axel s'approche encore plus de la fenêtre, les poings serrés. « Je suis là...» Murmura-t-il, bien qu'il savait qu'elle ne pouvait l'entendre.

Il se retourna finalement vers l'homme qui devait se poser de plus en plus de questions.
« Oui je suis mort depuis à peine quinze jours ! Et oui je n'arrive pas à tirer un trait sur ma vie vivante, et sur ma femme ! Oui je reviens sur terre souvent pour l'observer. Et alors ? ». Il en avait trop dit, il le savait et il se doutait bien que ces quelques précisions feraient naître d'autres questions, encore plus personnelles.

**Jayden Michael Wellington restait là, à regarder ce que l’inconnu observait, conservant toujours ce sourire amusé sur ses lèvres. Le brunet savait pourtant très bien qu’il dérangeait l’homme dans sa solitude, mais ça ne l’importait peu. Quant à lui, il désirait seulement avoir un peu de compagnie et s’amuser un peu. Il avait vécu assez de tragédie dans sa vie et dans sa mort pour déprimer de la sorte. Il savait ce qu’il vivait, parce qu’à son tour, il avait été tué, laissant sa femme seule sans lui, mais contrairement à lui, Jayden avait appris à vivre avec. Il avait accepté plutôt rapidement sa mort. Le fait d’avoir vu Amy dans une déprime totale, enfermée dans leur chambre, le matin de l’enterrement l’avait véritablement secoué. À un tel point qu’il avait décidé d’arrêter les visites. Il ne souhaitait pas souffrir de la voir comme ça et avec le temps, ce manque s’était dissipé. À l’heure qu’il était, Amy était morte, mais Jayden était en couple avec une autre personne ; Holly et il l’aimait plus que tout désormais. La blondinette ne faisait plus partie de son coeur, cela s’était un fait et elle semblait avoir compris. Cinq ans, c’est long après tout. On vit beaucoup de choses durant ce laps de temps. Il observait donc l’homme qui semblait totalement énervé par son comportement, mais bon, que pouvait-il faire de plus. L’homme lui répondit plutôt brièvement, mais il s’en fichait pas mal. C’est au moment où il changea de fenêtre pour admirer sa femme qui prenait une photo, sans doute celle du couple, Axel prit un air triste et lança une phrase digne d’un feuilleton télé. Jay poussa un rire et dit.**

Et moi aussi ! Mais bon, ça tu dois pas vraiment t’y intéresser ! Non, mais plus sérieusement mec, tu as pensé à prendre contact avec une voyante ? J’en connais quelques unes, ces femmes sont vivantes et peuvent communiquer avec nous ! C’est vraiment pratique dans des situations comme toi ! Je fais que proposer..

**Jayden ne savait pas si il allait bien le prendre, mais après tout, il faisait cela un peu pour se racheter de son mauvais comportement. Le brunet conclut sa phrase par un petit sourire. Il savait très bien que sa présence n’était pas apprécié de l’homme. Il lui raconta ensuite qu’il était mort depuis peu et qu’il n’acceptait pas d’être séparé de sa dulcinée. Jay serra les dents et ajouta même un second sourire.**

C’est pas top ça ! C’est le genre de truc qui arrive souvent avec les gens, même à moi, quand j’ai rejoint le Skyline, j’étais marié avec une superbe femme ! Mais bon, je l’ai oublié, pour mon propre bien.. Écoute mon gars, la douleur va partir !

**Jayden glissa sa main dans sa poche, s’appuya contre le mur de la demeure et s’alluma une cigarette. Il en tendit une au brunet. Il essayait de se racheter un peu plus, mais bon, ce n’était peut-être pas gagner. Il souhaitait seulement ne pas en venir aux poings, Jay avait souvent crée des situations de ce genre à cause de sa personnalité. Il se redressa ensuite et regarda à nouveau la jeune femme dans la demeure. Il ne connaissait pas son histoire, mais ça semblait pas être la joie d‘être mort. La question habituelle vint à l‘esprit du brunet qui ne put s‘empêcher de la lancer. De toute manière, sa curiosité gagnait toujours le terrain. Il aimait connaître la mort de chaque personne, comme quoi, on pouvait en apprendre beaucoup sur cette situation autant qu‘il pouvait comparer chaque connaissance qu‘il avait.**