Un pli soucieux barrant son front grimé d’encre, Samuel observa le bâtiment devant lequel il se tenait. Le tatoueur jeta un regard circulaire aux alentours, fouillant dans sa mémoire en essayant de déterminer si, oui ou non, il s’agissait du bon endroit. La dernière fois qu’il était venu ici, l’éclairage était totalement différent et, en réalité, il n’avait pas vraiment prêté attention au décor…
Son attention avait été tantôt été attirée par les bavardages de Jade, tantôt par ses blessures qui accaparait son attention et l’obligeait à se poser pas mal de questions. Questions auxquels il avait obtenu des réponses peu plaisantes depuis.

A présent, il savait que chaque blessure récoltée dans la Skyline apparaissait sur son corps abandonné dans le monde réel. Il ne se souvenait même as vraiment de la réintégration de son esprit dans son corps immobile. Immobile, pas vraiment, puisque karen le secouait dans l’idée de faire tomber quelques fruits de sa carcasse. Le jeune homme ne pouvait pas la blâmer cela dit et il comprenait que le trouver couvert de marques à ses côtés dans leur lit ait pu la faire paniquer…
Un instant il s’était trouvé dans la rue devant le loft de la petite blonde qui venait de lui offrir à boire et le suivant, il était dans sa chambre à coucher, envahit par une vague de douleur insupportable. Il lui avait fallut de longues secondes pour atterrir et reprendre pleinement conscience alors que Karen poussait des cris et lui hurlait des phrases décousues et incompréhensibles, persuadée qu’il était mort.

Comme il l’avait pressentie, après cet incident, sa petite amie avait eu du mal à le laisser retourner dans l’au-delà. Les cris étaient remplacés par des pleures, des menaces et des supplications. Lui tenir tête était de plus en plus éprouvant pour Samuel qui était partagé entre l’envie de la réconforter, de la rassurer et celle de retrouver Sandy pour l’aider dans ses recherches. Et puis il y avait Jade. Jade qui attendait certainement après son retour, désireuse dans savoir plus sur le sort de ses assassins.
Cependant, il n’était pas certain qu’elle se réjouisse de le voir revenir avec des nouvelles aussi nazes que celles qu’il avait pu dénicher en faisant jouer ses contacts dans la police.

Samuel poussa un soupir, crachant un nuage de fumée opaque dans l’air frai de cette fin de journée, pour s’avancer vers le bâtiment en jetant négligemment son mégot dans le caniveau. Il approcha de la liste des résidants, cherchant après la mention « Jade Angel », et finit par appuyer sur le bouton correspondant. Il patienta un petit moment avant que la voix familière de la blondinette s’élève de la machine.

« C’est Sam. Le…grand type tatoué qui t’a aidé l’autre soir » précisa-t-il, n’étant pas certain qu’elle le remette simplement avec son diminutif « J’viens à propos de ce dont on avait parlé »

Le silence lui répondit d’abord. Jade devait certainement digérer l’information et Sam prit son mal en patience. Finalement, le bourdonnement caractéristique s’éleva et il poussa la porte du hall pour pénétrer dans l’immeuble et rejoindre le loft de la jeune femme.

Jade était assez mécontente, elle n'avait pas réussis à réviser hier soir et elle n'était pas certaine d'avoir le temps aujourd'hui. Elle avait décidé de se mettre au sport et allait courir le matin. Du coup, elle était en tenue de sport, allongée sur son fauteuil lorsqu'elle se mit à réviser. Elle n'avait pas réellement envie d'aller se laver, oui, il y avait des fois où elle avait réellement la flemme. Elle regarda l'heure et commença à avoir faim. Elle allait sortir pour dîner tiens, parce que son frigo était désespérément vide. Elle finit de réviser vite fait quelques choses et partit sous la douche.

C'est toujours dans ce genre de moment là que le téléphone sonne ce pourquoi, elle le prit avec elle. Elle laissa glisser l'eau dans ses cheveux et alors qu'elle allait se faire un masque pour ses cheveux blonds mais fragile. Lorsqu'elle entendit quelqu'un sonnait du bas de l'immeuble. Elle sortit en trombe et elle prit une serviette, s'enroula dedans et toucha pour répondre et soudain, chuta. Sam... Elle mit une seconde à se souvenir de qui c'était, lui aussi précisa tout de même, au cas où. Elle essaya de se redresser mais glissa de nouveau lamentablement. Non mais, l'eau ça glisse. Quand elle se releva, elle appuya simplement sur le bouton pour ouvrir la porte et courut dans sa chambre. Elle passa un t-shirt et un short à toute vitesse, les imbibant d'eau. Elle prit une autre serviette, essuya vite ses cheveux et essuya le sol par la même occasion. Elle s'amusait bien, à cette instant, là à courir partout pour être assez présentable. Elle sourit largement. Elle entendit des pas dans le couloir et ouvrit la porte doucement.

Elle se pencha dans le couloir se faisant voir de Sam. Elle savait qu'il ne devait pas être trés sure de la porte où la jeune blonde habitait. Elle sourit en rentrant de nouveau et attacha ses cheveux mouillée dans un chignon assez vite fait. Elle prit deux verres, une bière pour lui du jus d'orange, pour elle. Elle posa tout sur la table, prit ses cours les jeta sur la table et se tourna enfin vers lui et dit

Tu as fais vachement vite ! Je m'attendais pas à te revoir si vite ! Et tu as vue, toujours en vie...

Elle ferma la porte et jeta les serviette dans sa salle de bains. Elle n'avait pas peur et n'avait certainement pas peur du ridicule. Elle était du coup mouillée de partout, les cheveux humides et pas maquillée. Bref une fille de 18 ans qui n'avait aucune envie de sortir ce jour là.

Samuel ne s’était pas imaginé une seule seconde qu’il tomberait mal et, si Jade avait répondu à l’interphone et lui avait permis d’entrer en prime, il avait supposé qu’elle serait visible et en mesure de le recevoir. Sauf qu’apparemment, ça n’était pas tout à fait le cas et il l’avait dérangée pendant qu’elle faisait un brin de toilette.
Pas besoin d’être un génie pour le deviner à cause de ses cheveux blonds (plus autant que d’habitude depuis qu’ils étaient trempés) dégoulinants d’eau, et ses vêtements imbibés. Une chance qu’elle n’ait pas opté pour des teintes claires qui lui aurait permis de tout discerner de son anatomie…
Elle paraissait un peu essoufflé et Samuel lutta contre lui-même pour arrêter son état des lieux et ne pas risquer de la mettre ma à l’aise en louchant sur le bazar qui régnait.

Il préféra adresser un petit sourire amusé à la jeune femme, suite à sa dernière remarque. La dernière fois qu’ils s’étaient croisés, la petite blonde était en fâcheuse posture et ça n’était pas la première fois puisqu’elle était morte dans des circonstances plus au moins similaires il y a quelques temps de cela. Elle était le genre de fille qui attirait vraisemblablement les ennuis et était douée de cette fâcheuse tendance à se trouver au mauvais endroit au mauvais moment.
Un peu comme Julian… Tous deux avaient fini par le payer de leur vie.

« Ouais, j’vois ça » finit-il par répondre, avant qu’un silence un peu pesant tombe entre eux deux

Le jeune homme enfonça ses mains dans les poches de son long manteau, essayant de nouveau de ne pas laisser son regard trop vagabonder sur le loft du petit brin de femme détrempé à ses côtés.
Devait-il enchainer directement en lui parlant de ce pour quoi il était venu se perdre ici ? Etait-il censé tourner autour du pot, la ménager ? Il avait déjà eu à faire ce genre de recherches pour les morts mais en règle générale, c’était eux qui lui couraient après et pas lui qui venait sonner chez eux… Du coup, il était un peu intimidé.

« Alors… tout va bien ? Ta main ? » demanda-t-il en désignant vaguement la jeune femme, son poing toujours enfoncé dans sa poche

Pour sa part, ses coups avaient eu le temps de s’estomper et la marque visible sur son visage tirait vers le jaune. Ses mains en revanche, étaient encore un peu écorchées mais ne lui faisaient plus mal le moins du monde.

Jade n'était en rien gêné par son intérieur, elle était bordélique et ça se voyait et bien tant pis. Elle sourit de toute ses dents quand elle vit qu'il essayait de ne pas trop regarder le bordel environnant. Elle ne dit rien, c'était amusant de le voir comme ça, impressionné alors qu'il faisait deux têtes de plus, était beaucoup plus fort et musclée que ses 50 kilos toute mouillée, donc environ le poid qu'elle pesait en ce moment avec les cheveux trempés. Elle regarda la bière sortit, et le jus d'orange, ainsi que le canapé qui était assez rangé pour les accueillir. Elle tourna la tête vers Sam de nouveau. Il avait parlé de sa main. Elle la regarda et sourit légèrement et dit

Guéris, la peau est encore un peu fine mais c'est guéris... J'ai décidé de me mettre au sport de combat... Comme ça je n'aurais plus besoin de gens tatoué sortis de nulle part.

Elle sourit légèrement. C'était gentil de sa part de s'occuper de ses blessures. Elle le regarda un peu plus sérieuse pour regarder ses blessures à lui et se rapprocha pour regarder son visage et elle fit une légère moue et dit avec une grimace

Encore une fois désolée pour ça...

Elle regarda son loft et dit

Fais comme chez toi, je t'ai sortis une bière, si ça te va pas, prends autre chose dans le frigo... Je vais aller chercher de quoi m'essuyer les cheveux.

Elle partit dans la salle de bains et reprit le téléphone qu'elle mit dans sa poche arrière et essuya vite fais ses jambes et ses bras encore humide et elle essuya par terre pour ne pas se casser la figure demain, parce qu'elle était capable de se tuer comme ça. Elle eut une idée et lança

Est-ce que tu as déjà manger ? Ça te dirait une pizza, j'allais commander justement.

Ce n'était pas dans ses projets mais autant rester ici si c'était pour entendre le destin de ses meurtriers, elle n'avait envie de se sapper le moral à sortir et surtout refaire une mauvaise rencontre dans la nuit avec lui, elle n'avait pas envie de réutiliser son poing. Elle sourit largement en revenant dans le salon. Attendant sa réponse.

Un sourire amusé étira une nouvelle fois les lèvres du jeune homme en un rictus qui aurait pu paraître inquiétant à cause de ses tatouages.

« La communauté des gens tatoués sortis de nul part te remercie » plaisanta-t-il simplement, avant qu’elle enchaine déjà.

Il avait oublié à quel point elle pouvait parler et de quelle manière diablement habile elle pouvait passer d’un sujet à un autre, depuis la dernière fois qu’ils s’étaient croisés dans la ruelle. Mais ça n’était pas plus mal l’un dans l’autre et ça l’empêchait de trop réfléchir à ce pour quoi il se trouvait là.

Une fois la blonde éclipsée dans la salle de bain, Samuel piétina un peu sur place, sans vraiment savoir quoi faire de lui-même, puis il décida de s’occuper les mains et la bouche en avalant quelques gorgées de bière. Il attrapa donc la bouteille, la décapsula à l’aide de son briquet pendant qu’il s’installait sur le canapé. Il s’enfila deux longues gorgées rafraichissantes avant de coincer la bière entre ses jambes pendant qu’il s’attelait à se débarrasser de son manteau sombre.
Il en était encore là quand la voix de la petite blonde s’éleva depuis la pièce d’eau où elle s’attardait.

« Euuh… Ouais ! OK ! » cria-t-il en réponse, après avoir rapidement pesé le pour et le contre de l’offre de Jade.

Il avait promis à Karen de ne pas revenir trop tard et de l’emmener manger un hot dog chez Leo, mais il avait l’estomac assez accommodant pour se permettre quelques part de pizza et une ou deux saucisses dans du pain…

Les secondes s’écoulèrent ensuite avec lenteur pendant que Jade terminait de s’essuyer, passait commande et qu’il sirotait sa bière, se mettant à l’aise. Il se pencha quelques fois pour attraper tel ou tel objets intrigants ou magazine à feuilleter, revenant toujours à sa position initiale pour s’envoyer quelques rasades de bière.
Finalement, alors que la blondinette venait le rejoindre, il reprit la parole.

« On peut fumer chez toi ? »

Jade sourit à la réponse de Sam et prit son téléphone pour commander une pizza. Eh bien, oui, même dans le monde des morts on pouvait commander. D'ailleurs c'était parfois beaucoup plus rapide que dans le monde réel. Jade prit son verre de jus d'orange et débarrassa la table, prit des couverts, les mit sur la table même si elle n'était pas réellement sûre qu'ils les utiliseraient. Elle préférait faire cela que de devoir aller en chercher une fois attablée. Elle regardait Sam assis et lui mit une autre bière devant lui. Elle avait l'habitude de faire ça avec les garçons qu'elle côtoyait vivante. Dés que leur verre ou bouteille était finis, elle en ramenait une autre. C'était comme ça, une habitude qu'elle n'avait apparemment pas perdus. Elle finit par s'asseoir et boire de nouveau un verre la bouteille prés d'elle. Elle avait les jambes sous elle, dans une attitude assez enfantine, elle n'avait jamais perdus cela. Elle regarda Sam lorsqu'il demanda si il pouvait fumer. Elle sourit largement.

Oui, on fume chez moi, mais seulement si on me passe une cigarette...

Avant même qu'elle est pus faire enrager un peu plus Sam. On sonna à la porte. Elle se leva doucement et sourit au livreur. Celui ci lui sourit largement... Elle ne put s'empêcher de lever mentalement les yeux aux ciels. Le même que d'habitude, apparemment sous son charme qui était carrément toujours en train de la tenir pendant cinq minutes. Elle ouvrit un peu plus la porte et il vit Sam. Elle sourit et le paya. Il disparut très vite. Elle ferma la porte et mit la pizza devant eux et se réinstalla avant de se relever, aller prendre des serviettes les mettre sur la table et se réinstalla avant de dire

Sers toi !

Elle en prit une part et croqua dedans. Cela lui rappela qu'elle n'avait même pas manger ce midi. Elle fit un léger sourire et regarda Sam. Il devait lui parler de ses agresseurs, mais elle n'était pas sûr qu'il soit très à l'aise. Elle sourit largement, il ne devrait pas, même si c'était de mauvaise nouvelle, elle n'était pas en sucre... Ou pas totalement. Elle lui lança un regard et dit

J'espère que t'es pas venu que pour moi... Bon au moins t'aura eus une pizza, mais t'aurais pas du te déranger si c'est le cas...

Alors qu’il fouillait déjà dans les poches de son manteau pour se dénicher un tube blanc et orange et en filer un à son hôte, la sonnerie retentit. Samuel adressa un regard en direction de Jade qui se leva en vitesse pour aller répondre et, une fois assuré qu’il s’agissait du livreur, le tatoueur renonça à sa cigarette pour la garder pour plus tard.
Certains pouvaient manger, fumer et boire en même temps, ça n’était pas son cas.

Il n’eut pas à patienter longtemps pour voir la petite blonde revenir avec la boite en carton qu’elle déposa sur la table basse devant eux. Suivant son conseil, il attrapa l’une des parts prédécouper (non sans quelques difficultés) et attrapa une serviette pour se caler confortablement dans le fond du sofa. Sa part pliée en deux pour la prendre à pleine main sans s’en mettre partout, il mordit dedans.
A ses côtés, après s’être servie elle aussi, jade reprit la parole.

Une fois encore, elle lui signalait qu’il n’aurait pas dû se déranger et s’excusait presque de continuer à exister dans la mort… C’était un peu agaçant mais Samuel ne lui en tint pas rigueur. Après tout, ils ne se connaissaient pas et elle ignorait peut-être qu’il ne faisait jamais rien qui le contrarie et l’ennuie. S’il avait décidé de l’aider et de se déranger, c’était parce qu’il en avait envie avant tout, certainement pas parce qu’il s’en sentait obligé.

« J’suis venu que pour toi, comme j’ai dis que j’le ferai, et j’repartirai dès qu’on s’ra venu à bout d’la pizza » répondit-il en essuyant ses lèvres à l’aide de la serviette, pour lui servir un petit sourire encourageant.

Une fois encore, un silence un peu gêné s’étira entre eux, heureusement justifié par leurs mastications. Alors que la jeune femme se resservait une part, Samuel termina sa première bière puis resta assis au bord du canapé, les coudes appuyés sur ses bras dans la position du type qui a un truc sérieux et douloureux à entendre à dire.
Il glissa un regard en direction de la petite blonde puis finit par se lancer. Il était là pour ça après tout et l’un comme l’autre le savait. Alors à quoi bon repousser l’inévitable ? La faire mariner n’allait pas faire évoluer la situation de toute ânière et elle était en droit de savoir.
Et puis il se sentirait minable d’attendre d’avoir le ventre plein pour lâcher sa bombe et risquer de se faire mettre à la porte pour laisser à Jade l’occasion de digérer tout ça (sans mauvais jeu de mots…)

« J’ai fait les recherches, comme j’t’avais dis et ça a pas pris bien longtemps à mes contacts pour retrouver leur traces. Tes…assassins font pas mal parler d’eux » débita Samuel en plongeant son regard cerclé de noir dans celui de la jeune femme « Ils trempent dans de sales trucs -de très sales trucs- et ont chacun un casier judiciaire long comme le bras. Ils ont fait de la taule pour un tas de trucs mais…mais pas pour ton meurtre. Ca n'apparait même pas dans leurs dossier. J’suis désolé, Jade… »

Il préféra se taire, prêt à répondre à d’autres questions ou à supporter le silence.

Jade sentit un peu le malaise s'installer quand il expliqua qu'il était là pour ça et rien d'autre et qu'il repartirait lorsque la pizza serait terminée. Elle savait bien pourquoi il était là, même si elle était étonnée qu'il demande quand même de ses nouvelles... C'était un mec bien au fond et ça peu de gens devaient réellement le voir. Parce que son physique faisait un peu peur. Elle avait été différente un moment, son style étant un peu décalé par rapport aux autres... Mais elle savait que beaucoup ne voyait pas plus loin que le bout de leur nez. Samuel était quelqu'un de bien et personne ne lui ferait croire le contraire. Peut-être un peu brutal dans ses paroles, un peu bourrue, mais certainement pas un mauvais bougre. Elle le regarda un instant et reprit une part de pizza. Le silence se fit.

Elle n'avait jamais réellement était dérangée par le silence, l'écoutant souvent lorsqu'elle était dans le foyer après l'accident de ses parents. Les autres dormaient sans bruit, comme ayant peur de se faire engueuler au cas où il en ferait trop. Elle avait les yeux grands ouvert, jouer avec ses cheveux, créant juste le bruit de ceux ci dans la pièce et elle écoutait le silence, réfléchissant doucement à ce qu'elle avait perdus. Durant ce silence, elle recommença à réfléchir. Elle n'était pas réellement quelqu'un de rancunier, mais allait-elle supporter le fait qu'il lui dise qu'il n'avait jamais été rechercher ou même jamais condamner. Elle le fixa soudainement, il s'était mis dans une position qui voulait clairement dire " ce que je veux te dire, c'est sérieux écoute bien". Elle le regarda attentive, en croquant dans sa pizza.

Il lui expliqua, que les deux hommes qui l'avaient tué, était bel et bien des fous dangereux. Des trafiquants sûrement ou dans cette branche. Enfin, il lui expliqua qu'ils avaient déjà été en prison. Mais pas pour son meurtre, qu'il n'était pas accusé. Elle ne dit rien, continuant de croquer dans son morceau de Pizza. Elle regardait un peu dans le vide. Il n'était pas punis pour son meurtre. Elle en était réellement affectée. Elle était morte mais en fait elle n'était juste qu'un dommage collatéral, quelques choses que l'on oublie et qui tombe au fond d'un tiroir plein de dossier non résolus mais dont on se contre fous de savoir s'il y a des coupables... Elle sentit sa gorge et son ventre se serait mais elle n'arrêta pas de croquer dans sa pizza, le regard perdus. Elle releva les yeux vers Sam, elle disait toujours que les yeux reflétaient l'âme, enfin c'est ce que sa mère croyait. Elle espérait qu'il ne voyait pas ce qu'elle ressentait. Elle savait qu'il s'en voulait déjà assez de ne pas lui apporter de bonne nouvelle...

C'est... Je vais pas dire que c'est pas grave... Mais au moins ils sont punis pour quelques choses... Et je préfère que ce soit moi qu'une gamine qui sors de l'école ou un gosse qui est là au mauvais moment...

La mort d'un enfant, c'était les pire assassinat du monde, selon le point de vue de Jade. Elle ne supportait pas que l'on lève la main sur un gosse, ou qu'on le maltraite. Elle détestait réellement l'idée. Et le fait de dire ça, c'était en partie la réalité. Même si elle était réellement choquée de n'être qu'un nom sur une liste de cas non résolus. Elle se releva doucement et partit prendre quelques choses de plus fort que du jus d'orange et lança

Tu veux une autre bière ?

Et comme un automate, elle n'attendit même pas sa réponse, en pris une lui donna et se servi un verre de vodka. Vodka pizza, le meilleur mélange quand elle déprimait légèrement. Quand Sam serait partie, elle s'enfilerait aussi le pot de glace, plein qu'elle avait acheté la veille. Et elle sortirait le lendemain pour s'envoyer quelques verres au bar et aller voir un film pour penser à autre chose.

Samuel s’était attendu à des larmes (qu’elle aurait bien sûr tenté de lui dissimuler), à ce qu’elle s’emporte violement et finisse par s’en prendre à lui qui faisait office de messager et le jeune homme s’était également attendu à ce que, sous le choc, elle ne réagisse pas du tout.
C’était cette dernière réaction qu’elle avait adopté après l’agression dont il avait été témoin et de laquelle il l’avait aidée à se tirer lors de leur rencontre. Elle n’avait pas pleuré, pas crié, elle s’était contenté de lui faire la conversation d’une voix cela dit un peu haut perchée, mais sans basculer dans l’hystérie.
Avait-elle une prédisposition à gérer les situations de crise ou bien était-ce encore une fois sa manière de réagir au choc ? Est-ce qu’après son départ l’autre fois, elle était allé se rouler en boule sous sa douche pour pleurer durant de longue heure ? Avait-elle détruit du mobilier aujourd’hui remplacé ? Pas moyen de le savoir.
En tout cas, Sam était prêt cette fois. Prêt à l’écouter, la consoler si le besoin s’en faisait sentir, à essuyer ses attaques et à…faire la conversation.

Il la regarda mordre dans sa pizza, l’air ailleurs, ce qu’il comprenait tout à fait. Patient, les mains toujours croisées devant lui, il guettait le moindre de ses mouvements dans l’expectative d’une attitude à adopter lui-même, en réponse à la sienne.
Et finalement, comme elle avait l’habitude de le faire, Jade tenta de dédramatiser la situation, de voir le bien dans le mal. C’était en réalité quelque chose qu’il avait du mal à comprendre. Elle était morte. Elle était une de ces gosses dont elle parlait qui s’était retrouvée au mauvais endroit au mauvais moment. Elle n’était qu’une gosse nom de dieu !
Mais c’n’était selon elle pas grave.

Finalement, Samuel ne tarda pas à réaliser qu’il s’était attendu à beaucoup de réactions, mais avait espéré la colère. Il aurait préféré la voir se révolter, pleurer de rage, peut-être le frapper parce qu’il était porteur de nouvelles aussi déplaisantes.
Elle était morte et tout le monde s’en foutait. Une gosse se faisait descendre dans une ruelle sombre et le monde continuait de tourner, les gens continuaient de passer su Starbucks prendre leur dose de caféine, les amoureux se bécotaient encore sur les bancs, et personne ne prenait deux minutes pour s’arrêter et remarquer que quelque chose clochait sérieusement.

Les poings crispés, les mâchoires scellées par un mélange de colère et de frustration, il resta d’abord sans voix. Il faisait face à Jade, mais il ne voyait pas vraiment la jeune femme qu’elle était, il voyait celle qu’elle n’était plus. Il voyait son frère, Julian, baignant dans son sang, s’étouffant en essayant de lui parler. Il voyait Thomas, les yeux grands ouverts sur le vide, dans une ruelle du même genre que celle où il avait rencontré Jade.
Eux non plus n’avaient pas été vengés. Justice n’avait pas été faite. Et c’était tout simplement insupportable.

Il attrapa la bière qu’elle lui tendit, s’arrachant à ses pensées, jetant un petit coup d’œil sur la bière encore pleine qui l’attendait déjà sur la table basse. Alors finalement, elle était bel et bien sous le choc.
Samuel garda la bière en main, l’observa avaler son verre de vodka sans un mot puis, n’y tenant plus, repris la parole.

« J’peux les faire payer. J’peux trouver un moyen » assura-t-il « T’as qu’un mot à dire et je les fais payer »

Jade regardait dans le vide et remarqua un peu trop tard, la bière déjà sur la table et celle que Sam avait dans les mains. Elle était à côté de ses chaussures. Elle se rappelait bien avoir eu la même réaction lors de leur première rencontre. Elle gérait plutôt bien les chocs. La mort de ses parents, son intégration dans un foyer, son adoption, le manque de soin qu'elle avait reçus et même sa mort elle avait réussi à gérer. Elle était comme ça, elle préférait gérer et tout retenir plutôt que de montrer ses émotions. Sa mère était comme ça et elle n'avait jamais vus sa mère pleurait ou geindre ou quoi que se soit. Elle ne voulait pas se montrer faible. Mais... Là c'était un peu trop, pour elle. Elle avait géré sa mort, d'accord c'était déjà un miracle. Elle avait 18 ans merde, elle n'avait rien vus et elle avait réussis à gérer cette putain de mort dans le Skyline. Elle vivait assez normale ! Mais dans la vie, dans la vraie, personne n'avait fais le travail qu'il devait. Ses parents adoptifs devaient seulement déplorer avec de fausses larmes sa mort, et avait sûrement eus le droit à un chèque parce que les flics n'avaient pas fait leur boulot. Elle était belle la grosse pomme, c'était beau l'Amérique...

Elle ne pouvait plus réellement gérer, elle était juste un déchet qu'on laissait sur le bord d'une ruelle en lançant un regard dédaigneux ? Elle sentait en quelques sortes la colère qui émanait de Sam. Lui aussi était en colère, elle se souviens qu'il avait parlé d'un de ses frères morts... Peut-être que c'était pour ça qu'il était en colère. Elle n'en fut que plus en rage, mais son visage, ses yeux, ses mouvements ne montraient en rien cet énervement. Quand elle avait faillis être agresser, elle c'était remise durant la nuit du choc et n'avait rien fais pour expulser cette rage qui l'avait légèrement habité une fois seule. Mais c'était quelques choses de réellement difficile là tout de suite. Elle détacha ses cheveux un peu plus secs que depuis l'arrivée de Sam. Ils tombèrent autour de son visage. Etant appuyé sur ses genoux, le visage un peu penché, elle était réellement cachée aux yeux de Sam. Elle ne pleurait pas mais ses mâchoires venaient de se serrer assez convulsivement... Elle ne mangeait plus, tant pis, pour la pizza, mais si elle avalait quelques choses, elle allait s'étouffer ou aller tout recracher dans sa salle de bains. Elle reposa doucement la part à peine entamé sur le carton et déglutit.

La voix de Sam rompit le silence. Il lui disait qu'il pouvait la venger... Elle sentit ses traits se tirer. Quel genre de personne serait-elle si elle lui demandait de faire ça ? Une égoïste, une personne aussi fous que ceux qui l'avaient tué. Mais elle en mourrait d'envie. On lui disait dans sa vraie vie que ses yeux avaient tendance à foncer lorsqu'elle était en colère, elle ne l'avait jamais crus mais si ses yeux se foncés en ce moment précis, ils seraient certainement noir. Elle les ferma un instant. L'instant d’après, elle était debout, les mains dans les cheveux la table retournée au sol, la bière fracassait et la pizza écrasait lamentablement au sol. Elle reprit une respiration pour se calmer un peu et d'une voix froide elle dit

Je veux pas que tu gâches la vie qui te reste... Je m'en voudrais plus qu'autre chose... Ce que je voudrais c'est pouvoir leur faire comprendre que quand ils seront ici... Je leur ferais payer au centuple... Ce que j'aimerais c'est pouvoir hanté chaque petite nuit de leur existence minable.

Son ton ne ressemblait en rien à celui qu'elle employait d'habitude. Plus profond, un peu la voix qu'elle prenait lorsqu'elle chantait un peu rauque... Enfin bref, rien à voir avec l'hystérie légère ou le ton posé qu'elle adoptait d'habitude. Elle regarda la table, reprit les pieds la remit à l'endroit et lança

Désolée pour la pizza...

Samuel eut un mouvement de recule involontaire en voyant soudain la petite blonde se dresser pour retourner la table. Elle était décidément pleine de surprises, ce qui pouvait être un bien autant qu’un mal. En l’occurrence, il n’était pas mécontent de la voir enfin s’exprimer librement, aussi violente soit la réaction.
Lui aussi bouillonnait de rage. Lui aussi voulait retourner des tables, exigeait des réponses à toutes les questions qui tournaient dans son cerveau depuis les meurtres de ses ainés. Lui aussi voulait jouer les fantômes et hanter ceux qui étaient responsable de la dissolution de sa famille.

Cela dit, comprendre Jade ne l’empêcha pas d’être parcourut d’un frisson en entendant avec quelle froideur la jeune femme s’était exprimée. Son ton était tranchant, glacial, et terriblement infamilier. Pas qu’il fréquente la petite blonde depuis longtemps, mais tout de même assez pour savoir que ça n’était pas dans ses habitudes.

« C’est…c’est rien » réussit-il à articuler lorsqu’elle s’excusa pour leur repas retourné.

Il s’arracha à sa torpeur méditative pour l’aider à remettre un peu d’ordre, succinctement, puis s’immobilisa pour essayer de capter le regard de Jade. Ses longs cheveux encore humides et ondulants ne lui facilitaient pas la tâche cela dit et Samuel finit par venir à sa rencontre. Il hésita quelques secondes puis, finalement, apposa ses deux mains sur les épaules frêles et encore tremblantes de colère de l’esprit.
Après quelques secondes, un peu contrainte, elle finit par relever son charmant minois vers lui et plongea son regard incisif dans le sien.

« Ils paieront. Un jour, il paieront pour ça, d’une manière ou d’une autre »

Sa réplique sonnait comme une promesse. Il ne lui parlait plus de les faire payer lui-même, ni ne sous-entendait que Jade pourrait se charger de les faire souffrir, c’était simplement un état de fait. Ils paieraient. Samuel y croyait et il fallait qu’elle aussi y croit.
Elle ne voulait pas qu’il se mouille dans cette histoire davantage et au fond, lui non plus n’en avait pas tellement envie. C’était l’idée de vengeance et de justice qui le séduisait autant qu’elle. Mais plus de vengeance qu’autre chose… Ca n’était pas sain, il le savait, et Thomas l’aurait sévèrement réprimandé, mais c’était plus fort que lui. Et c’était compréhensible, non ? Jade le comprenait tout du moins.

« On s’en assurera. Et si c’est pas dans l’autre monde, alors ce sera ici » ajouta-t-il finalement

HJ: j'ai perdu l'inspiration à ton départ, ma p'tite, alors tu te contenteras de ça et tu diras : merci monsieur !

Jade sentait tout un tas de sentiments se mélangeaient en elle. Elle était en rage, c'était la chose dominante dans son esprit, la rage et l'envie de vengeance était bien plus fort que tout, mais ses membres ne tremblaient pas seulement à cause de cette rage. Elle était triste aussi. Triste de savoir que personne ne s'occupait réellement d'elle, triste de savoir qu'elle avait perdus ses parents bien trop tôt. Triste de se rendre compte que le monde était réellement pourris et qu'elle était morte comme on laisse mourir un chien errant. Elle était aussi perdue, à quoi bon mourir, si de toute façon jamais rien ne viens les aider à se sentir mieux, oui la vie après la mort c'était bien beau. Mais merde on pouvait pas juste avoir un peu de réconfort. On pouvait pas influencer ce putain de destin pour avoir un peu de joie, savoir que ses meurtriers sont en prison ou au moins est été rechercher, mais non, c'était impossible bien entendus. Pourquoi les gens qui n'ont jamais fais de mal à personne aurait le droit d'être rassurée de savoir que leur meurtrier n'allait pas pouvoir recommencer. C'était trop demander sûrement, qu'est ce que c'est la paix d'un esprit par rapport à la vie d'une raclure, rien du tout, de la merde peut-être ?

Sam avait paru surpris et avait peut-être eu peur. Elle aurait sûrement eu la même réaction si elle c'était vus. Elle se connaissait bien et savait que ce genre de réaction ne lui ressemblait pas vraiment. Elle avait une main plaqué sur son ventre, à l'endroit exact où la balle était entrée dans sa chaire et elle ne sut pourquoi elle fit ça mais alors que Sam posait ses mains sur ses épaules pour la forcer à le regarder, elle enfonça ses ongles dans sa peau, comme pour ressentir, de nouveau, cette douleur, pour se prouver que tout ça c'était bien passé. Son comportement était complètement irrationnelle, elle en avait conscience mais elle n'y pouvait rien, elle était en plein crise de rage. Sa respiration était plus hachée, par son énervement aussi peut-être à cause de la douleur qu'elle s'infligeait et la douleur mentale. C'était la première fois qu'une chose comme ça lui arrivait... La première fois qu'elle perdait le contrôle d'elle-même.

Puis elle finit par relever les yeux vers Sam, les émotions continuant de tourné dans sa tête. Elle le fixa un moment, ses traits restaient tirés, elle savait que sa voix resterait froide tant qu'elle ne se serait pas calmé. Elle essayait de le faire, parce qu'il n'était pas obligé de subir cette colère et cette haine pure qu'elle avait envers les deux gars qui l'avaient tué. Mais il parla... Il dit que ces hommes payeraient, d'une manière ou d'une autre. Elle ne put s'empêcher d'être en colère contre lui aussi. Dire ça revenait à ne rien dire et même la phrase qu'il ajouta par la suite ne la radoucit pas... Elle se dégagea de ses mains et dit

Parce que toi tu crois au karma ou à une connerie de ce genre ? Tu crois que ces gars vont payer leur acte ? Qu'il y a une justice divine ou une connerie comme ça ?! Mais Dieu ou Bouddha ou ce putain de Karma, ça n'existe pas ! Ce sont toujours les gens comme ces enfoirés de fils... C'est toujours eux qui s'en sortent ! Eux se paient de belle bagnoles, se paient des prostituées et fondent des familles pendant que toi pauvre con que t'es d'avoir fais le bien dans ta vie tu crèves en pleine rue TOUTE SEULE A SE DEMANDER QU'EST CE QUE TA FAIS POUR MÉRITAIS ÇA...

Elle s'éloigna. Elle avait parlé froidement, cassante. Elle n'était pas comme ça d'habitude et ça l'effrayait un peu mais elle ne se contrôlait plus réellement. Elle sentait que ce n'était pas que sa mort qui l'affectait à ce moment-là. Tout revenez d'un coup, tout ce qu'elle avait refouler, la mort de ses parents, le foyer, l'adoption le manque de tendresse... Toutes ces années à galérer, pour en arriver où ? Pour en arriver à crever dans une ruelle alors que deux mecs tout à fait dangereux se baladaient tranquillement dans les villes ? Elle était en face de son unique miroir en dehors de celui de la salle de bains. Au-dessus de son épaule elle voyait Sam mais elle voyait surtout son visage plein de haine. Elle ne supporta pas et flanqua un coup de poing qui le fit se briser... 7ans de malheur, c'était rien, elle était déjà morte. Elle avait frappé avec la main à peine guéris et elle ferma les yeux pour souffler, la pression retombant légèrement...

Ses yeux rivés sur le dos de la jeune femme qui s’agitait au rythme de sa respiration saccadée, Samuel poussa un soupir. Il leva les yeux au ciel, les poings sur les hanches. Il n’était pas en train de mépriser Jade et son comportement puéril face au miroir, il cherchait simplement des réponses. Et les réponses, c’était le gros fumeur de nuage perché là-haut qui était censé les avoir. C’était ce que sa mère pensait tout du moins et, lorsqu’il avait peur où était vraiment désespéré, c’était malgré tout vers Lui que se tournait Samuel.
Lui, l’Imperceptible. Celui qui était censé veiller sur eux, les rappeler à lui lorsqu’ils passaient l’arme à gauche pour les faire baigner dans sa lumière divine. Lui la force, la sagesse, la douceur. Mais la plupart du temps, Lui n’était que colère et Sam ne comprenait pas à quoi rimait ses actions.
Et puis il avait franchit le tunnel blanc et il avait compris. Lui se foutait ouvertement de leur gueule à tous. Lui jouait à ce jeu tendance consistant à faire vivre un personnage de la naissance à la mort. Et puis franchement, qui n’avait jamais retiré l’échelle de la piscine ou provoqué un incendie, juste pour voir son avatar mourir, hm ?

Tout ça était pourri et du point de vue de Samuel, la seule solution à tous leurs maux étaient le feu. Tout détruis, tout purifier avec un bon gros incendie. Mais lorsqu’il en parlait avec Karen (toujours avec un coup dans le nez) elle lui demandait s’il envisageait vraiment de faire rôtir d’adorables et innocents petits bébés. S’il était prêt à entendre les râles d’agonies de petits chatons dévorés par les flammes.
Alors il tempérait un peu son discours et acceptait d’épargner les enfants et les animaux. Et elle lui sortait alors l’argument ultime : oui mais quand ils seront plus vieux ces bébés et deviendront des tueurs en série, tu feras quoi ?
Nouvel incendie. C’était une boucle infernale et il n’y avait pas de solution.
Si on voulait faire payer les méchants, il fallait sacrifier les gentils, c’était comme ça. C’était détestable, mais c’était comme ça.

Non, il ne croyait pas vraiment au karma. Il ne croyait pas non plus à Dieu ou à n’importe quelle divinité. Il ne croyait en rien. Mais ça n’était pas l’envie qui lui manquait.
Et pour le moment, ce que le tatoueur désirait surtout, c’était trouver les bons mots pour calmer Jade et l’apaiser un peu. Sauf qu’il ne la connaissait pas suffisamment pour savoir quoi dire ou quoi faire. Devait-il seulement prendre la parole ? Devait-il la laisser seule ? Aucune idée.

Alors finalement, abandonnant l’idée de lui parler de ses croyances, de ses doutes et de sa propre rage bouillonnante, le jeune homme tiqua d’agacement et se dirigea d’un pas pressé vers la cuisine. Là, il attrapa un torchon, l’humidifia au robinet puis revint vers Jade, toujours face au miroir.
Il hésita un instant à prendre sa main pour la panser lui-même et s’assurer qu’elle n’était pas trop amochée mais y renonça. Il se rappelait encore trop bien comment la petite blonde l’avait repoussé un instant plus tôt.

« Mets ça » conseilla-t-il simplement en lui tendant l’essuie à vaisselle

Elle allait rechigner, il le voyait d’ici. Elle ne devait même pas vraiment ressentir la douleur tant elle enrageait. Sa colère électrisait l’air, devenant contagieuse. Un poison qu’il inhalait et qui imprégnait sa peau tatouée, le rendait lui-même fébrile. Mais il ne devait pas se laisser avoir. Les esprits avaient la fâcheuse tendance d’empiéter un peu trop sur ses sentiments lorsqu’ils tombaient dans les extrêmes. Le retour de manivelle de son don d’empathie…

Elle avait les yeux fermés essayant de reprendre une respiration un peu plus normal. Elle avait encaissé beaucoup de choses depuis qu'elle était venu au monde. Elle avait pris des coups au moral depuis qu'elle était bébé. Elle avait toujours fait bonne figure, elle n'avait jamais réellement baissé les bras... Elle était de ce genre de fille qui avait dès la naissance ce moral d'acier, cet esprit de battante. Elle avait toujours vus ça comme un don, elle pensait jusque maintenant que cet esprit là l'aidait, la protégeait des attaques perfide du monde. Elle avait pensé pouvoir vivre toute sa vie en gérant intérieurement, sans que personne ne puisse s'en apercevoir, tout les malheurs qui lui était arrivée. Fallait quand même être une sacrée malchanceuse pour, être abandonner dans le froid, adopté par des gens formidable et qu'ils se tuent dans un accident de voiture, finir dans une famille qui n'en avait rien à faire et en plus de tout cela, mourir dans une ruelle par des criminels même pas rechercher pour ce crime là. Elle sentit les tremblements revenir, elle n'arriverait pas à ce calmer, il fallait qu'elle exprime tout ce qu'elle gardait pour elle pour pouvoir se calmer de nouveau, elle le sentait.

Alors qu'elle lâchait légèrement prise, elle entendit Sam bougeait dans son dos, elle en avait presque oublié sa présence. Les larmes coulaient sans qu'elle ne puisse rien y faire, elle sentait aussi du sang coulait sur sa main, c'était chaud, plutôt agréable, la douleur n'était pas présente. Puis quand il reviens, elle avait ouvert les yeux, la respiration encore un peu plus difficile... Elle tourna la tête quand il tendit la serviette et elle la prit un instant avant de ressentir cette rage. Oui, elle avait accepté le fait d'être morte mais de vivre de nouveau, mais là pour le moment rien n'avait de sens. Alors oui, elle jeta le torchon au sol et dit rageuse

Mais ce truc me sers à quoi... JE SUIS MORTE... C'est pas un truc comme ça qui va m'aider !!

Elle ne savait même plus ce qu'elle disait et elle voulait évacuer cette rage, évacuer tout ce qu'elle avait gardé pour elle. Malheureusement pour Sam qui n'y était pour rien, elle n'avait que lui pour se défouler. Elle le regardait, son physique ne lui faisait pas peur à cet instant, il aurait pu faire 300 kilos de muscle qu'elle aurait pus lui sauter à la gorge. L'adrénaline et la haine se mélangeant au sens et à ses esprits. Elle grogna assez fortement et dit

Merde, qui décide tout ça ?! Le destin, Dieu... Non mais de qui on se fout ! Merde !

Elle leva les yeux, comme pour s'adresser à Dieu et hurla

TU M'AS PAS DEJA ASSEZ FAIS SOUFFRIR

Elle regarda de nouveau le linge au sol et se tourna vers Sam, ses esprits étaient mélangés, ses idées n'avaient plus aucun sens. Elle était totalement hystérique. Et sans réellement savoir pourquoi, elle poussa Sam et lui hurla

On m'a abandonné quand j'étais à peine né dans la rue en plein hiver à Saint Petersbourg... Tu te rends même pas compte du froid qui fait !!! J'y es survécus...

Elle le poussa de nouveau en continuant de pleurer et de hurler

J'ai perdus mes parents adoptifs dans un accident de voiture, j'm'en suis sortis et pas eux !

Elle laissait parler tout ce qu'elle avait retenu, 18 ans de frustration, de rage et de larme contenus. Elle envoya de nouveau balader sa table basse ce qui brisa aussi une de ses lampes. Elle passa ses mains dans ses cheveux, se rendant maintenant compte que sa main saignait et que ça lui faisait mal, quand ses cheveux se mêlèrent au sang alors qu'ils venaient d'être lavé. Elle hurla de rage et poussa de nouveau Sam légèrement, elle se demandait pourquoi il ne répliquait pas, pourquoi il ne partait pas. Mais au moins, elle pouvait se déchaîner.

J'ai vécus dans un foyer avant d'être adopté par des cons qui n'en avaient rien à foutre de moi. J'ai survécus pour être tué par des putains de trafiquant de je ne sais quoi. Qui sont même pas punis... Qu'est-ce que j'ai fait pour mériter ça hein

Elle ne comprenait même plus pourquoi elle était comme ça. Pourquoi elle avait gardé autant de choses en elle, elle ne comprenait pas pourquoi elle s'en prenait à Sam... Rien de tout ça n'avait de logique, est-ce que la haine en avait ? Mais tout ce qu'elle savait c'est que hurler et dire ce qu'elle avait sur le coeur n'avait rien changé à son état de rage.